La ville en un point flou, loin derrière. Une bande d'ocre et d'argile paressant sous les feux de midi et le trot de black horse se répercutant au nord et au sud, libre de tout obstacle. Puis, soudain à l'orée du chemin, une plaine tranquille pour planter tente et tabac. J'y ai obtenu ma première fragrance. Une note amère, végétale, éloge à la route et aux terres promises.

Un soir sec et aride, dans un saloon miteux, nos regards se sont croisés. Ses cheveux sentaient la liberté, les grands espaces sauvages et sa peau, comme une légère fragrance de tabac, quelque chose de volatile et doré. Elle est partie une nuit poussée par l'appel des hautes plaines. Parfois son souvenir me caresse comme une brise sauvage. Son regard, son odeur, la fumée s'échappant de ses lèvres. Love Blond for ever ...

Une sacrée monture. À notre première chevauchée, il s'est cabré et m'a fait tombé de selle. Un pur sang fière et sauvage. Depuis, je ne l'ai jamais vraiment dompté. D'égal à égal, nous parcourons plateaux et vallées. Sa cadence est devenue mienne. J'ai créé un tabac pour mon vieux compagnon, un hommage semblable à son pelage, puissant et noir.

Il y avait sa silhouette massive, se découpant dans l'aube naissante. Et ses mains cherchant dans le cours d'eau pépites et poussières d'or. C'était un ancien minier, venu avec pelle et pioche découvrir de nouveaux filons. Il m'a enseigné la patience et le lent séchage du tabac. J'ai accroché au mur ses outils, souvenir de trésor jamais trouvé et d'amitié inattendue.

Un cerf au pied agile, traqué tout l'automne sans succès. Il semblait voltiger entre les roches, disparaître dans les eaux des rivières. Enfin, je l'ai découvert assoupi entre mes plants, paisible et sans défense. J'ai détourné le regard et j'ai confectionné un tabac à son image, une ode à la vie et à la force.